Ammonitrate : un premier pas vers l’ouverture du marché

De gauche à droite: Jose Manuel Roche Ramo (Secrétaire général, UPA Aragon, Espagne), Minette Batters (Présidente, NFU, GB), Juha Marttila (Président, MTK, Finlande), Joe Healy (Président, IFA, Irlande), Joachim Rukwied (Président, COPA et DBV, Allemagne), Christian Pées (Président, Coop de France Métiers du grain), Henri Brichart (Vice-président, FNSEA) et Pekka Pesonen (Secrétaire général, COPA-COGECA), présentant le texte du règlement d’exécution 2018/1722 de la Commission du 14 novembre 2018 diminuant de 30% les taxes antidumping sur l’ammonitrate de Russie

 

L’AGPB s’investit, avec l’appui de la FNSEA, et du Copa-Cogeca, pour rendre plus concurrentiel le marché européen des engrais azotés, qui est actuellement beaucoup plus protégé que le marché de nos produits.

De concert avec Coop de France Métiers du grain et 6 autres syndicats agricoles européens (CIA et Confagricoltura, Italie ; IFA, Irlande ; MTK, Finlande ; NFU, Royaume-Uni et UPA, Espagne), nous avons officiellement demandé et obtenu en août 2017 la réouverture d’une enquête par la Commission européenne pour supprimer les droits antidumping qui frappent l’ammonitrate d’origine russe et participent au maintien pour ce produit d’un niveau de prix en Europe supérieur au prix mondial.

Et le 14 novembre 2018, nous avons enfin obtenu une victoire au niveau européen : la Commission vient de décider à l’issue de son enquête de baisser de 30% le niveau des droits antidumping en vigueur sur l’ammonitrate russe, qui étaient de 47€/t.

Ce n’est bien sûr qu’une demi-victoire, car les prix de l’ammonitrate en Europe resteront plus élevés qu’ailleurs tant que le nouveau droit antidumping de 33 €/t ne sera pas supprimé. De plus, dans un contexte de hausse conjoncturelle des prix de l’azote, cette baisse sera probablement imperceptible au niveau des prix payés par les agriculteurs.

Mais c’est une bonne nouvelle qui souligne enfin que ce sont les agriculteurs européens qui sont les premières victimes de la situation et non l’industrie des engrais. C’est aussi une victoire syndicale car, après des années de démarches sans succès, nous avons obtenu de la Commission qu’elle rouvre le dossier de la concurrence sur le marché européen des engrais et qu’elle aboutisse à plusieurs conclusions importantes :

• La concentration de l'industrie de l’ammonitrate s'est accentuée en conséquence de nombreuses fusions et acquisitions, 4 groupes produisant plus de 75% du total européen.

• Les fabricants européens contrôlent plus de 96% du marché intérieur de l’ammonitrate, les importations étant insignifiantes à cause de la protection du marché

• L’industrie européenne des engrais, qui emploie environ 1 000 salariés, s’est fortement restructurée depuis 2002, ses profits ont nettement augmenté et sa situation financière est saine. Elle n’a pas subi de préjudice au cours des dernières années.

C’est donc un pas dans la bonne direction, même s’il est insuffisant car le prix européen de l’azote continue à être trop élevé. C’est cette concurrence insuffisante qui a permis aux producteurs d’engrais d’augmenter depuis 6 mois les prix de l’ammonitrate 33,5 granulé de plus de 60 €/tonne.

L’étude menée en 2016 par l’institut IFPRI (International Food Policy Research Institute) évalue à un milliard d’euros chaque année le surcoût que les agriculteurs européens paient pour leurs engrais à cause des barrières douanières et d’un manque de concurrence. Une ponction qui alimente les industriels de l’amont. Et un boulet insupportable qui plombe leur compétitivité en Europe comme à l’exportation, puisque les producteurs vendent leurs grains au prix mondial face à des concurrents, de Mer noire ou des Amériques, qui ont accès à des engrais moins chers.

A l’occasion du prochain réexamen en 2019 au titre de l’expiration des mesures antidumping qui frappent l’ammonitrate, la Commission européenne doit y mettre un terme, et nous veillerons à ce qu’elle conduise enfin une vraie évaluation de « l’intérêt de l’UE », qui doit mettre dans la balance celui de l’industrie et celui de l’agriculture.

A terme, ce sont également les droits de douane “ordinaires” de 6,5% à l’importation des engrais en Europe qui doivent disparaître. Les producteurs agricoles ont droit, eux aussi, à un revenu décent. Les producteurs d’engrais doivent réaliser qu’ils n’ont pas d’avenir sans une agriculture européenne en bonne santé économique.

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