Agroécologie La séquestration carbone peut être rémunérée

Rémunérer les agriculteurs pour la captation du carbone que leur exploitation peut effectuer : l’idée est séduisante et une entreprise, Soil Capital, valorise ce travail à hauteur de 27,50 euros la tonne de CO2 emprisonnée.
 
« L’agriculture régénérative, comme l’agriculture de conservation et agroécologie, est un levier d’amélioration économique et écologique. […] J’ai la conviction qu’il ne faut pas opposer économie et écologique », a indiqué le 23 septembre, lors d’une visioconférence, Chuck de Liedekerke.
Selon la définition de Nicolas Verschuere, agriculteur belge et cofondateur, avec Chuck de Liedekerke, de la société Soil Capital, l’agriculture régénérative vise à diminuer les intrants chimiques, notamment les engrais azotés, à minimiser le travail du sol mais aussi à maximiser la couverture du sol avec des plantes vivantes et favoriser la biodiversité, en particulier par des haies, des bandes enherbées ou encore des cultures associées. « Il faut faire en sorte de diminuer la monoculture. L’avoine associée à la féverole permet de diminuer le nombre d’insectes nuisibles. De plus, la féverole fournit de l’azote à l’avoine », a précisé Nicolas Verschuere
 
 
Un million d’ha en 2025
Avec l’intention « d’aligner rentabilité et performance environnementale des fermes », cet ancien banquier passé chez Morgan Stanley entend payer les agriculteurs pour leurs actions de protection de l’environnement, plus spécifiquement sur la séquestration carbone. Cette dernière s’effectue grâce à la photosynthèse qui concentre le CO2, a expliqué Chuck de Liedekerke.
Les agriculteurs intéressés peuvent contractualiser, pendant cinq ans, avec l’entreprise belge, via le programme Soil Capital Carbon. Ainsi, à titre d’exemple « une exploitation de 100 ha en région Hauts-de-France, qui cultive des pommes de terre, des betteraves, du blé, du colza et de l'orge d’hiver aura le potentiel d’aller chercher 2 tonnes d’équivalent CO2 par hectare et par an. L’agriculteur pourra alors toucher au minimum 5 500 euros par an », a expliqué Chuck de Liedekerke. Il garantit le prix de la tonne de carbone séquestrée à 27,5 euros. Il a toutefois précisé que 20 % de la somme globale ne seraient disponibles que 10 ans plus tard. Il faudra aussi à l’agriculteur déduire les frais de diagnostic, d’audit et de commercialisation des certificats carbone*, soit environ 1 000 euros par an. Soit un total de 3 420 euros net disponibles pour l’agriculteur pour chacune des cinq années du programme.
D’ores et déjà une vingtaine d’agriculteurs se sont inscrits à ce programme qui concerne aussi bien les exploitants français que belges. Nicolas Verschuere et Chuck de Liedekerke espèrent bien séduire encore 130 agriculteurs supplémentaires pendant le dernier trimestre 2020, pour atteindre 150 inscrits au 31 décembre. « Pour 2025, nous visons 10 000 agriculteurs et 1 million d’hectares en Belgique et en France d’abord, puis dans d’autres pays européens », ontils conclu.
 
Née en 2013, Soil Capital est une société « d’agronomes indépendants et de professionnels de la finance qui cherchent à améliorer la performance économique et environnementale des exploitations agricoles ». Son équipe est constituée de 12 employés, basés en Belgique. Elle intervient un peu partout dans le monde mais particulièrement en Belgique et en France.
 
*Pour chaque tonne stockée ou non émise, l’agriculteur reçoit un certificat carbone développé et commercialisé par l’entreprise South Pole spécialisée dans les crédits carbone
 
AUTEUR : Christophe Soulard - Actuagri